Épilogue

 

Il y a maintenant deux jours que je suis à l’hôpital, le bras dans le plâtre. Un orthopédiste doit passer me voir cet après-midi pour m’expliquer le résultat des radios et définir le type de rééducation dont je vais avoir besoin. J’ai eu Julia Ochsner au téléphone. Elle m’a invitée à venir passer ma convalescence chez elle en Floride. Elle m’a promis soleil et repos, mais je la soupçonne plutôt de chercher un quatrième pour le bridge. Ma note d’honoraires finale s’élève à 1 987,35 dollars mais elle n’a pas l’intention de me payer avant de me voir sonner à sa porte. Méfiez-vous des petites vieilles dames, ce sont souvent des dures à cuire, ce que je suis loin de pouvoir dire de moi-même. J’ai mal partout. Quand je me regarde dans la glace je ne me reconnais pas : bouche enflée, joues tuméfiées et l’arête de mon nez a l’air aplati. Je ressens aussi une douleur d’une autre nature, et que je suis incapable d’identifier. J’ai classé le dossier mais ce n’est pas la fin de l’histoire. Il nous faut attendre de savoir ce que décidera la justice et j’ai appris à être prudente dans ce domaine. Entre-temps, je regarde par la fenêtre les feuilles des palmiers se balancer en me demandant combien de fois encore je danserai avec la mort avant que l’orchestre ne plie bagages pour la nuit.

Bien à vous.

Kinsey Millhone